jueves, 4 de diciembre de 2014

Argerich et Chailly : affiche de luxe à l’Orchestre de Paris


La classe de la pianiste Martha Argerich et du chef Riccardo Chailly dans un programme Schumann (Concerto pour piano) et Rachmaninov (Symphonie n°1). Compte-rendu d’une soirée de gala à Pleyel le 3 décembre. Même programme le 4.


Pour son pénultième concert à la salle Pleyel, avant le déménagement à la Philharmonie en janvier, l’orchestre de Paris proposait une affiche de luxe les 3 et 4 décembre : Martha Argerich au piano et Riccardo Chailly à la baguette. Nous y étions le premier soir. C’est naturellement dans un concerto que les deux artistes ont associé leurs talents, celui de Schumann, un des rares à figurer au répertoire très restreint de la brillante pianiste argentine.
Crinière grise et allure aussi décontractée que si elle se rendait à une répétition, Martha Argerich impose d’emblée son empreinte. Le piano reprend en effet très vite le thème principal du mouvement qui vient d’être délicatement énoncé par le hautbois. Comme on pouvait s’y attendre l’artiste ne va pas se contenter de répéter mais elle en varie l’inflexion, le contour et même le tempo. Fidèle à sa réputation, la pianiste semble créer dans l’instant, inventer la musique sous nos yeux et nos oreilles. Il faut dire que le concerto de Schumann, plus fantaisie improvisée que structure rigoureuse, se prête admirablement à cette exaltation de l’immédiateté. Au chef et à l’orchestre de suivre le cheminement de la pianiste.
Si le finale, le passage le plus faible du concerto, aurait pu se montrer plus convaincu, les deux mouvements précédents s’imposèrent comme des modèles de liberté et d’écoute mutuelle. Martha Argerich se garde bien de transformer ce concerto en une banale expression de la virtuosité conquérante. Elle y débusque les moindres signes d’inquiétude et de doute, le regard souvent tourné vers l’orchestre comme pour mieux partager une partition qui relève de la musique de chambre à grande échelle. D’une classe folle, Riccardo Chailly évite de brusquer l’orchestre sans pourtant l’abandonner ni épaissir le son.

Sonorité de l’orchestre allégée

Mais, avouons-le, c’est la « Symphonie n°1 » de Rachmaninov qui laissera une empreinte encore plus durable. Cette œuvre touffue comme la plus dense des taïgas peut facilement égarer musiciens et auditeurs faute d’une boussole fiable. Une carte détaillée en tête, Riccardo Chailly n’hésite pas un instant et, le geste aussi sûr qu’élégant, mène ses troupes à bon port. Il est étonnant de constater combien il a pu alléger la sonorité de l’orchestre de Paris sans en diluer les couleurs. Malgré un effectif imposant, riche en cuivres et percussions, les lignes restent claires, les rythmes vigoureux et l’homogénéité exemplaire.
Le premier mouvement est conduit tambour battant et le finale, malgré ses maladresses d’écriture, ne fléchit pas un instant. Chailly ne lâche jamais prise mais il ne garrotte jamais les musiciens. Il faudrait citer chaque pupitre de l’orchestre de Paris qui fit montre d’un engagement et d’un brio mémorables (les cors et les violoncelles notamment). Radio Classique a eu l’heureuse idée de diffuser ce concert en direct hier. Il est redonné ce soir. A ne pas manquer...s’il reste des places.
Orchestre de Paris - Riccardo Chailly - Martha Argerich, le 4 décembre à 20 h 00, Paris, Salle Pleyel (01 42 56 13 13)
Dernier concert de l’orchestre de Paris, salle Pleyel , le mercredi 10 décembre sous la direction de Louis Langrée (Schubert : Symphonie n°4-Mozart : Messe en ut mineur)
Philippe Venturini


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